• Clémentine porte la culotte

     

     

    M. Combes n'hésite guère. Le chef du gouvernement signe sans rechigner l'autorisation de travestissement. Après tout, Clémentine n'est pas une femme ordinaire. On peut bien lui accorder cette faveur. Ça ne plaira pas à tout le monde. Les bigots s'indigneront. Lui, le séminariste repenti rallié aux rad-socs anticléricaux, en jubile d'avance. Et puis, l'image vaut bien quelques concessions. Il a déjà réservé ses exemplaires à la Lorraine. Il ne doute pas que le costume d'homme lui sierra à merveille. Avec sa barbe et ses formes généreuses, le pantalon lui ira comme un gant. Il a déjà prévu d'envoyer les cartes à quelques personnes bien choisies... en amuse-bouche, avant sa loi de séparation des Églises et de l'État.


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  • Rencontre au sommet, au jardin du LuxembourgQuand le général Tom Pouce rencontre le roi à la tête de poire, l'histoire est si amusante qu'on veut bien la tenir pour vraie.
    Le lilliputien, en tournée en Europe, fausse compagnie à son mentor Barnum et s'offre une distraction dans le fameux parc parisien. Autour du bassin, il demande à un bonhomme qui manœuvre un petit voilier s'il peut s'amuser avec lui. Le monsieur, qui n'est autre que le roi Louis-Philippe venu incognito se délasser, y consent volontiers.
    Ils se présentent, se réjouissent de la coïncidence. L'un échappé des mains de son directeur, l'autre de celles de son premier ministre, jureront de se revoir.

    L'on savait inventer de belles histoires, aussi, à cette époque, pour l'édification des masses.


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  • Général Tom Pouce

    Charles S. Stratton ne pesait pas bien lourd quand Barnum l'embaucha : 7 kg tout mouillé et peu de frais de tailleur à prévoir pour Taylor, si peu qu'il pouvait bien compenser en lui confectionnant, à son protégé, un uniforme personnel, style napoléonien, ou un trois pièces avec haut-de-forme, pour varier. Le placement se révéla lucratif ; le petit bonhomme avec ses quelques centimètres et ses dispositions aux arts du spectacle rapporta un joli pactole à son généreux propriétaire. Gloire internationale, l'enfant précoce brûla les planches, serra les pinces des monarques européens et, plus tard, se maria en grande pompe. Une statue au sommet d'un piédestal à sa mesure fut même érigée en son honneur, à Bridgeport, Connecticut. 

     

    Charles Sherwood Stratton as Napolean with Livinia -
    Mathew Brady (commons.wikimedia.org)


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  • La barbue, mascotte des poilus

     

     

    La grande guerre dévaste la Lorraine. La clientèle du café est partie au front. Clémentine donne alors de sa personne. Infirmière au chevet des blessés, au service de la Croix Rouge, son dévouement est tel qu'il force l'admiration. Sa réputation fait le tour des casernes. On célèbre sa pilosité généreuse, l'intronise marraine, bonne fée et mascotte de la soldatesque velue. D'aucuns iront jusqu'à se tatouer son portrait sur leur ventre, barbe garantie en poils véritables de leur pubis.

     

     

     

     

    Source photo : gallica.bnf.fr


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  •  Autopsie de JoiceQuand, en 1836, la plus vieille femme du monde, à l'âge honorable de 162 ans, décède à la suite d'un malencontreux coup de froid, la communauté scientifique voit là l'occasion de percer les mystères de sa longévité. L'éminent Docteur David L. Rogers se penche donc sur son cas et après découpages, extractions, incisions, analyses, donne ses conclusions au public. Joice Heth n'avait pas plus de 80 ans.
    Quoi ! s'indigne Barnum, ce n'est pas possible. Il y a tromperie sur la marchandise. Le médecin s'est trompé de corps. Il n'a pas charcuté le bon cadavre. Non, non, affirme-t-on, les organes appartenaient bien à la célèbre esclave noire.
    Quoi ! s'indigne Barnum, mais c'est un scandale ! La main sur le cœur, l'entrepreneur de spectacles jure s'être fait floué. On lui a fourgué de la contrefaçon, il était persuadé qu'elle avait presque deux siècles. Voilà à quoi ça mène, de faire confiance aux gens !


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  • La cage aux enfants

    Dans la cage, Scola a bouclé les enfants. Affreux sales et méchants condamnés au parc à mouflets. La journée embastillés, faut qu'il s'habituent. En prison pour que les parents, simili-bêtes à bas instincts, vivotent, se débattent, se perpétuent. The struggle for un sou. Pas de quartier pour ton prochain. Les rats volent à ras des rancœurs et des freaks. Gare à la mort-aux-rats dans les pasta.
    Du plan séquence au plan rapproché, la caméra d'Ettore vire scalpel, s'appesantit sur les visages, incise. Collés agrippés, bouches et paupières au grillage. Des cailloux l'escaladent, crapahutent, accrochés à une cordée de mômes perdus qui leur font la courte échelle. Entre les doigts, file le néant. Il tempo che passa et la plaie suppure. L'image englue les cœurs, poisse la cervelle. Un rire jaune lancé de travers, qui taillade la gorge, empêche de pleurer. È commedia !

     


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  • Dans la cage aux lions, Clémentine à table gagne à l'écarté, pendant que Camillius, le dompteur, fait caracoler les bêtes terrifiées par sa crinière, au-dessus de sa tête et de la dame de pique. Ooohhhh ! Un cliché l'immortalise, trinquant à l'exploit, une coupe de champagne à la main. Aaaaahhh ! Elle y retourne mais, cette fois, sans les fauves, et entre les barreaux, vend des cartes postales à son effigie et à sa gloire. Seule... derrière les grilles. Je n'ai pas trouvé la photo.

    Ref, ici.


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  • La nourrice de George Washington

     

     1835, année drolatique.
    "110 ans à Louisville, 161 à Philadelphie, Joice Heth : la femme qui n'attend pas les années pour vieillir, qui défie les lois de l'espace-temps. Venez l'admirer, la momie ambulante et quasi aveugle, avec sa face décharnée, ses membres paralysés. Qui croirait à voir ainsi la vieille esclave, qu'elle a porté et soigné le père de la nation, George Washington ?"

     

     

    — Tu te poses là et tu bouges plus ! Je m'occupe du reste.
    Il guide la vieille dame, l'installe dans son fauteuil, prend du recul et examine le tableau.
    — Souris ! lui enjoint-il. Ouvre la bouche.
    Elle s'exécute. C'est mieux, songe-t-il. 
    — Cache pas tes mains !
    Il faut tout lui dire... Elle délie ses doigts crochus, arbore ses ongles recourbés.
    — Voilà ! C'est pas compliqué !


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  • Un tour sur le net et c'est le retour du mort-vivant.
    On le dit, on l'affirme, sur wiki (et si wikipédia le dit...), sur maints sites ou blogs, Phineas Taylor Barnum, mort en 1891, propose au sortir de la première guerre mondiale, un contrat mirobolant à la femme à barbe. C'est qu'il a plus d'un tour dans son sac, l'homme d'affaires, qu'il n'en est pas à sa première imposture. Phineas Taylor a rencontré Clémentine Delait, avec plus de peau sur les os, près de trente ans après avoir rendu son dernier soupir.
    Je ne peux que m'incliner ; il a su forger sa légende, cet homme-là, et dans l'ouest, quand la légende dépasse la réalité, on publie la légende !


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  • Les gencives nues de Joice Heth

    Joice n'est plus bonne à rien. Lindsay, le sait qui s'est bien fait avoir en l'achetant à ce planteur du Kentucky. Il croyait pourtant que son allure de momie ambulante attirerait le chaland, qu'il en tirerait un peu de beurre pour ses épinards. Mais non, le public, ça ne l'intéresse pas. Alors, quand Barnum pose ses mille dollars sur la table, devant lui, il n'hésite pas. L'esclave noire, il la lui fourgue avec ses félicitations. Bon débarras !

    Phil le Magnifique, qui a l’œil et beaucoup de nez, prend Joice sous son aile et lui arrache séance tenante les six ou sept dents qu'il lui reste.
    — Souris, enjoint-il à la vieille femme.
    Elle sourit. Barnum approuve, satisfait. Il ne s'est pas trompé : édentée, elle paraît cinquante ans de plus.


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