• ... je me permets de vous soumettre une brève œuvre de fiction, un trip/texte éclair (et néanmoins sombre) d'à peu près 110 000 secs, qui s'intitule Machinchose.
    Si je m'en réfère à votre profession de foi, publiée sur la page d'accueil de votre site, mon court roman devrait vous intéresser. Oui, il devrait... J'en doute néanmoins tant il engendre de la perplexité. Dans ces conditions, je le sais, je devrais m'abstenir mais s'il fallait que je m'abstienne à chaque fois que je doute, je n'aurais plus qu'à finir comme ce pauvre Bartleby et "je préfèrerais ne pas"...

    Dans le doute...


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  • Cette enquête est gênante. Faudrait pas qu'en examinant la bête, ils déduisent les mauvais traitements. Cela ferait mauvais genre. Le mieux serait de les prendre de court et d'emballer la dissimulation de preuves dans les contours d'une drama propre à déclencher une immense émotion populaire. Qu'on en oublie les sournoises accusations des pointilleux de la cause animale !
    Le plus problématique sera de l'attirer sur les rails juste au moment où la locomotive déboule. Le reste ira de soi. L'histoire toute trouvée : l'éléphant s'élance au secours de l'éléphanteau et se sacrifie pour le sauver. De quoi faire pleurer dans les chaumières. Et de soustraire le corps aux autorités pour cause d'hommage national et en vertu du respect dû au mort célèbre. On se dépêchera d'empailler l'animal et, par la même occasion, de le raccommoder un peu, de ravauder les lésions, d'en atténuer les traces. Ni vu ni connu. Une remise à neuf qui vaudra à Jumbo un baroud d'honneur et une tournée post-mortem pavée de succès. Barnum, dans son inépuisable ingéniosité, lui inventera même une veuve pour l'accompagner dans ses exhibitions.

    Image : source.  


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  • Autour des Brèves revisitées, avec les 4ème du collège Paul-Elie Dubois

    J'ai eu le plaisir de rencontrer début mars la classe de 4ème C du collège Paul-Élie Dubois (à L'Isle sur le Doubs), à l'invitation de sa professeure de français (et avec la documentaliste de l'établissement), afin de parler de la nouvelle en générale et des Brèves revisitées en particulier. Une intervention en illustration de la thématique la fiction pour interroger le réel. L'échange s'est conclu par un passage de relais puisque les élèves ont à leur tour été sollicités, avec pour mission de s'inspirer, à l'instar des auteurs du collectif des éditions Zonaires, de brèves de l'actualité (qu'ils auront choisies) pour en tirer des histoires.
    Ils ont accepté de jouer le jeu. J'ai le privilège de les accompagner dans leurs travaux d'écriture. Ils sont à l'ouvrage sur des textes variés, plein de ressorts et de fantaisie, poétiques et à l'imagination débridée, des textes d'où émane une énergie bien revigorante. Un grand bravo à eux !

     

     


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  • Un effondrement

    J'avais 16 ou 17 ans quand j'ai écrit ce texte. Des années, avec d'autres avant, d'autres après, où je sillonnais, le plus souvent solitaire, les rues de Paris. De la porte de Choisy, où j'habitais, jusqu'aux Halles et Beaubourg en passant par le quartier latin, où j'étudiais. Mon territoire, balisé par les salles obscures que je hantais et qui m'ont fait découvrir le monde, les salles Action, le Champo, L'Escurial, le Reflet Médicis, le Hauteufeuille, le Galande où, pendant des années, l'on a diffusé Brazil et où se tenait (se tient toujours) la grand messe du Rocky Horror Picture Show, et toutes les autres salles, celles des Gobelins, d'Odéon ou des Halles. Mon territoire avec ses points d'ancrage qu'étaient la Contrescarpe, le Luco, les quais et le Vert-Galant, le boulmich ou L'odéon, et les libraires, les disquaires où je traînais, les cafés où l'on se rejoignait et Notre Dame pour phare, à la vue de laquelle, à chaque fois, je me sentais pousser des ailes. 
    J'avais 16 ou 17 ans, quand j'ai écrit ce texte un peu bancal, emphatique et sentimental, maladroit et ponctué de clichés, néanmoins sincère ; un texte intégré dans un recueil qui depuis dort dans un carton, avec tant d'autres qui l'ont rejoint. Et il y a un peu de cet adolescent, qui est parti en fumée avec Notre Dame. Consumé. Une petite mort. 

    J'avais 16 ou 17 ans quand j'ai écrit ce texte, que j'exhume et restitue tel quel : 

    Ballade

    J'ai fait l'amour sur un toit de Paris avec mon ombre,
    Alors qu'un nuage indiscret s'étalait autour de moi.
    J'arrêtai le temps pour le chevaucher et m'élançai dans la pénombre.
    Je planai, abandonné dans tes possessifs bras,
    Ma Dame, qui ont étreint jusqu'au plus laid des hommes.
    Prostituée respectable, tu t'es offerte à Quasimodo,
    Et aujourd'hui, c'est à moi, éperdu, que tu te donnes.
    Je dansai entre les jambes encourageantes du Pont Neuf,
    Attiré par les improbables silhouettes que dessinaient les belvédères
    Et me jetai dans la Seine, où échoué sur une invisible nef,
    Je fus porté vers l'ange qui me frôla de son aile légère.
    Je volai au-dessus de la République au regard triste
    Et me sentis coupable, coupable de ses détresses ;
    Je pleurai et elle posa sur les miennes ses lèvres discrètes.
    Mes larmes rejoignirent celles, intarissables, des Champs-Élysées
    Et je me laissai conduire par les flots jusqu'à l'Arc
    Dont le triomphe faisait pâlir l'obélisque exilé.
    Je redécouvris le fascinant et imposant tombeau face au parc
    Et le surpris à regretter son allure terrifiante,
    Tandis que les rues m'encourageaient de leurs sourires
    À les pénétrer, à entrer dans leur insatiable ventre.
    J'appréciai le corps frémissant de la rue de Mouffetard,
    Me délectai jusqu'à l'ivresse de la sensuelle rue de Buci
    Et connus la jouissance avec Saint-Andre-Des-Arts.
    Enfin, j'offris mon corps, répandis mon sang, rue Saint-Denis,
    Abandonnai mon âme repue sur les toits de Montmartre
    Et je mourus pour devenir Paris.

     


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  • Je traverse le temps
    Comme une plume l'air
    Sans faire de bruits sans faire de vagues.

                                                             Je t'aime.


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  • Janka riait. Il riait à s’en décrocher les mâchoires. À se tenir les côtes. À s’étouffer. Trop plein de bonheur. Quelle journée ! Si belle journée.

    Dans les égouts, les rats pullulaient.

    Il avait couru tout du long. Le long du fleuve. Sur les quais bruyants. Puants. Vibrants. Cerbère l’accompagnait. Cerbère haletait. Un filet de bave au coin de la gueule.
    Assise, la mère les regardait. Elle surveillait son enfant. Bienveillante sur son banc. Tandis que la ville bourdonnait. Exhalait l’affairement. Nul n’eût pu dire d’où suintait le malaise.
    Le vieux se tenait sur le pont. Accoudé à la balustrade. Il reniflait. Il toussait. Les voitures vrombissaient derrière lui. Crachaient leur langue de fuite. Des postillons que le soleil portait en nimbe de poussières. Des vapeurs lourdes qui stagnaient à ras des visages.
    Du bitume sourdait l’écho rampant des pas de la vieille. Elle descendait les escaliers. L’accès aux berges. La canne résonante. Toc, toc, toc… Elle avançait. Titubait. Oscillait. La main sur son front. Sueur. L’angoisse perlait sur les pavés, telle une nappe d’huile se répandant en des rigoles d’amertume. En même temps, elle égrenait ses soupirs. Suffocation. Les battements de l’artère souterraine.

    La mère se détourna. Lent mouvement du corps. Noya son regard dans les prunelles vitreuses de la vieille. Clapotis. Une péniche passa, troubla les ondes, sécréta de l’écume grise que le courant balaya, absorba. Les vaguelettes se brisèrent une à une. S’écrasèrent sur la digue. Cerbère aboya. Janka s’approcha.

    Dans les égouts, les rats se défièrent.

    Il reconnut la vieille. Il redressa la tête. Éblouissement. Le soleil lui tira des larmes de douleur. Rayons enfumés qui irisaient les flaques de chaleur. Les doigts en visière, il distingua la silhouette du vieux. Là-haut. Sur le pont… Alors, Janka saigna du nez. Gouttes de sang sur la terre assoiffée. Avalées, dissoutes. Janka saigna du nez. Des spasmes le secouèrent.

    Dans les égouts, les rats s'entre-tuèrent.

    La 12ème mort de Janka


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